Construction d'un centre culturel
Paris (75)
Programme : Centre culturel et extension d'une école par une cour oasis
Client : Ville de Paris
Moe : Ylé mandataire
Equipe : NDF (paysage), EVP (structure), Ecallard (économie), B52 (fluides, thermiques), Art (acoustique), 2IDF (VRD), Nobatek (conception environnementale),
Surface : 1.387 m²
Budget : 6.2 M € HT
Date : concours 2024
Conception biomimétique
Projet en matériaux biosourcés, label niveau 3 équivalent 189 kg/m²
Ventilation naturelle par cheminées solaires
Ossature bois avec remplissage chènevotte insufflée
Finition en chanvre monté en pisé et enduit d'huile de lin
Image : Paris Picture Club
Révéler un site unique
Le Centre Culturel Rigoles s’érige au cœur du quartier de Belleville, dont l’histoire est étroitement liée à la présence de l’eau. Pendant de nombreux siècles, les versants de la colline étaient occupés par des domaines agricoles et viticoles. Ces terres en pente étaient exploitées, et le territoire témoignait du ruissellement des eaux de pluie. La composition géologique des sols sablonneux, abritant une couche de glaise perméable, favorisait la rétention des eaux. Dès le Moyen-Âge, cette caractéristique naturelle fut exploitée par la construction de réseaux hydrauliques, permettant la collecte et l’acheminement des eaux de pluie vers les points de consommation. Au fil des siècles, ces aménagements se sont étendus pour répondre aux besoins croissants de la ville de Paris, laissant une empreinte significative sur la géographie du quartier.
L’influence prépondérante de l’eau dans l’évolution de Belleville demeure encore perceptible de nos jours à travers la présence de nombreuses constructions et s’exprime dans les noms évocateurs des rues actuelles, telles que la rue des Cascades, la rue de la Mare, la rue des Rigoles, entre autres. La place Henri Malberg témoigne particulièrement de cette relation privilégiée avec l’eau. Autrefois dénommée Place des Grandes Rigoles, elle abritait au XIXe siècle, à l’angle de la rue Jourdain, voisine de la parcelle actuelle du projet, le Grand Lavoir des Rigoles. Ce lieu public était surmonté d’une imposante cheminée en briques destinée à évacuer la vapeur des eaux, marquant ainsi de manière imposante l’ensemble du quartier.
Notre objectif est de concevoir une architecture qui émerge naturellement du site, trouvant sa légitimité en tenant compte à la fois du programme et de la réalité économique. Il s’agit de créer un projet qui s’inscrit en tant que continuité, une architecture sensible, révélatrice de la mémoire des lieux.
Une organisation claire et évidente
Le schéma organisationnel se veut clair et limpide, il apparaît comme une évidence.
La façade du centre culturel longe la place Henri Malberg, tandis qu’un jardin linéaire s’étend le long de la limite sud-ouest et l’extension de la cour Oasis se niche au fond de la parcelle. L’organisation fonctionnelle du bâtiment, centrée autour du hall d’accueil, divise le projet en deux ailes distinctes : les salles de pratiques artistiques au sud et la salle polyvalente au nord, avec les salles de danse en toiture, permettant à l’agriculture urbaine de s’étendre sur toute la longueur de la toiture.
Le pôle danse, positionné stratégiquement, limite la hauteur du bâtiment du côté de l’espace public et offre une exposition optimale pour la toiture bio-solaire, améliorant l’efficacité des panneaux photovoltaïques. Le hall d’entrée central assure une distribution optimale des flux, garantissant l’autonomie fonctionnelle des différentes entités programmatiques et une clarté de lecture depuis l’extérieur.
Le choix d’un bâtiment linéaire vise à préserver les espaces libres périphériques, favorisant ainsi le développement du jardin commun et de la cour oasis.
Le projet se développe en plusieurs strates depuis le sol, cherchant une stabilité thermique, tout en captant l’énergie solaire. Diverses couches, représentant les différents éléments naturels, coexistent pour former un écosystème harmonieux, accessible à tous les usagers. Cette conception permet des rencontres entre la flore et la faune, favorisant une interaction harmonieuse avec l’environnement naturel.
Une conception biomimétique
Le développement d’un centre culturel selon les principes de la conception biomimétique implique de s’inspirer des modèles et des principes observés dans la nature pour concevoir un édifice durable, économe en énergie et en parfaite harmonie avec son environnement.
Notre approche repose sur une analyse approfondie de notre histoire et de notre nature, intégrant les préoccupations liées au respect de l’environnement et aux changements climatiques. L’alliance entre l’inscription patrimoniale et le développement durable traduit notre engagement commun à mieux intégrer la dimension temporelle, à articuler de manière plus cohérente le passé, le présent et le futur, dans une perspective de transmission et de solidarité intergénérationnelle
La conception du centre culturel intègre harmonieusement les spécificités topographiques du site, préservant la déclivité naturelle pour créer une relation dynamique entre l’intérieur et l’extérieur tout en créant un îlot de fraicheur.
Dans un second temps, la conception biomimétique du projet s’appuie sur les éléments naturels du site. Un micro-cycle hydrologique reproduit le cycle de l’eau, avec la récupération, le stockage, et l’utilisation optimale des eaux de pluie. L’approche intègre également un système de ventilation assistée par des cheminées solaires, visibles depuis la place, symbolisant la démarche biomimétique tout en réinterprétant le patrimoine local. La toiture biosolaire complète cette approche durable en captant l’énergie solaire.
Un bâtiment biosourcé et bas carbone, couplé à une maitrise de la maintenance et des coûts de fonctionnement
Notre conception positionnera le Centre Culturel des Rigoles en tant qu’exemple éminent d’équipement public privilégiant les matériaux naturels en France. Conçu avec des objectifs ambitieux en matière d’intégration de matériaux biosourcés (178 kg/m² SDP pour 100kg/m² SDP exigés au programme) et d’émissions de CO2 (748 kgCO2eq/m² SU + circulations), le projet repose sur une structure porteuse bois et une enveloppe en béton de chanvre compressé avec protection liquide, établissant un lien avec le passé agricole du site.
La structure porteuse bois et l’enveloppe en chanvre incarnent une approche innovante, tout comme l’utilisation du CLT pour les planchers intermédiaires et la toiture. La toiture du R+2, supportant des panneaux biosolaires, et les menuiseries en bois équipées de brise-soleils orientables illustrent une recherche constante d’efficacité énergétique.
La performance énergétique du bâtiment est optimisée avec une enveloppe très performante, favorisant la conservation de la chaleur en hiver tout en limitant son entrée en été. Un système de pompe à chaleur géothermique sur nappe, complété par une pompe à chaleur air/eau en appoint, assure la production de chaleur de manière efficace. Les panneaux rayonnants contribuent à une distribution homogène de la chaleur, avec la possibilité future d’utiliser la géothermie pour le rafraîchissement.
La ventilation, cruciale pour le confort des usagers, est assurée par une ventilation naturelle assistée grâce à la mise en œuvre de cheminées solaires.
Le Centre Culturel des Rigoles émerge ainsi comme un exemple remarquable de l’harmonie entre innovation architecturale, durabilité environnementale et efficacité fonctionnelle.